DANS LA MARGE

et pas seulement par les (dis) grâces de la géographie et de l'histoire...

vendredi 25 juin 2010

P 302. Départ à la dérive

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Nuages à la mode de Caen (Ph. JEA / DR).


"Bris de mots"
pour Amaryllis
lors de l'échange
de feuilles nomades...


Départ à la dérive
d’un nuage débranché
comme un poisson bancal
tombé de son bocal

à l’aurore l’horizon fait fort
qui presse lentement
le fruit d’un soleil
à l’écorce précoce

tôt ou tard le vent
parle avec les ongles
aux arbres trop durs
de la feuille

(Ph. JEA / DR).

qui a coupé la gorge
de cet oiseau chiffonné
qui dessinait au fusain
des fuseaux hors pairs ?

et cette chouette le compas
dans l’œil
rêve-t-elle encore d’épures
à l’architecture sans futurs ?

un caillou si triste
un autre autiste
un troisième artiste
le chemin a mal aux reins

j’ai plus que
l’âge de mes artères
dyna-mitées
mais encore ?

(Ph. JEA / DR).

Ce blog entre en sommeil quelques jours...

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mercredi 23 juin 2010

P. 301. Le dernier tour de piste de Tati

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4 novembre 1982.
Tati s'en était allé...
Le voici revenu pour un dernier tour de piste...
(Ph. Trafic / DR).


L'Illusionniste
de
Sylvain Chomet


Synopsis :

- "À la fin des années 50, une révolution agite l’univers du music-hall : le succès phénoménal du rock, dont les jeunes vedettes attirent les foules, tandis que les numéros traditionnels - acrobates, jongleurs, ventriloques - sont jugés démodés. Notre héros, l’illusionniste, ne peut que constater qu’il appartient désormais à une catégorie d’artistes en voie de disparition. Les propositions de contrats se faisant de plus en plus rares, il est contraint de quitter les grandes salles parisiennes et part avec ses colombes et son lapin tenter sa chance à Londres. Mais la situation est la même au Royaume-Uni : il se résigne alors à se produire dans des petits théâtres, des garden-parties, des cafés, puis dans le pub d’un village de la côte ouest de l’Écosse, où il rencontre Alice, une jeune fille qui va changer sa vie à jamais.
L’illusionniste présente ses tours devant les villageois enthousiastes, ravis de célébrer ainsi l’arrivée de l’électricité sur leur île isolée. Alice, stupéfaite, croit à la réalité des petits miracles du prestidigitateur. Elle le suit jusqu’à Edimbourg et s’occupe de son appartement pendant qu’il travaille dans un petit théâtre. Enchanté par son enthousiasme, l’illusionniste la remercie en faisant apparaître comme par magie des cadeaux de plus en plus somptueux. Prêt à tout pour ne pas la décevoir, il ne peut se résoudre à lui avouer que les problèmes de la vie ne se résolvent pas d’un coup de baguette magique… et court à la ruine pour continuer à lui acheter ce qui lui fait envie. Mais Alice devient adulte et rencontre l’amour…
L’illusionniste comprend qu’il est temps que le numéro créé pour elle s’achève : il laisse son ultime spectatrice vivre sa vraie vie de femme, loin de ses tours de passe-passe, et part en la sachant heureuse."
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Sylvain Chomet :

- "J'ai surtout essayé de garder intacte cette émotion que j'avais eue en lisant le script pour la première fois. Il fallait que ce soit un peu plus réaliste et crédible que Les Triplettes.... Les animateurs ont fait un travail fantastique. Il n'y a aucun plan obtenu par rotoscopie, tout provient de l'imaginaire. Je voulais qu'en voyant le film, on oublie très vite le dessin. C'était important pour la fin du récit et l'émotion que génèrent les personnages.
Dans les Triplettes..., il y a environ 1 400 plans, ce qui est assez habituel pour un film d'animation. Dans celui-ci, on en a 400. On parle ici vraiment de théâtre filmé."
(L’Express, 8 juin 2010).

Olivier de Bruyn :

- "En 2003, il tourneboulait le cinéma avec un film d'animation merveilleux, « Les Triplettes de Belleville ». Triomphe international. Sept ans plus tard, alors que la 3D impose le port de lunettes partout dans le monde, Sylvain Chomet revient sur les écrans avec un film artisanal, « L'Illusionniste », d'après un scénario inédit de Jacques Tati. Singulier, forcément.
A l'origine, « L'Illusionniste » devait être un film de et avec Tati. L'inventeur de « Playtime » a écrit le scénario il y a un demi-siècle sous le nom de code « Film Tati n°4 ». Le projet n'a jamais abouti. Le réalisateur considérait la matière autobiographique du script trop grave et ce dernier a fini dans les archives.
Aidé par les proches du cinéaste (Sophie Tatischeff, sa fille, puis Jérôme Deschamps et Macha Makeïeff des Deschiens qui veillent sur le rayonnement de l'œuvre de Tati), Sylvain Chomet, fan absolu du créateur de « Mon oncle », a ressuscité le scénario, apporté quelques modifications (l'action ne se déroule plus à Prague, mais en Ecosse) et apporté sa touche à ce film en forme de libre hommage."

(Rue89, 16 juin 2010).

(Montage JEA / DR).

Emmanuel Didier :

- "La symbiose de ces deux êtres abandonnés, lâchés sans amarre, est bouleversante. Tatischeff quitte famille et Paris pour l’Ecosse, la jeune Alice son île pour la capitale scottish. Ils coupent tous deux les cordons qui les relient à leurs attaches, à leur aliénation également. Se reconstituant un petit nid commun dans un hôtel miteux, ils (ré)apprennent à se servir d’eux-mêmes sans se sentir morveux.
De cette reconquête identitaire de deux personnages, Chomet et Tati ont l’habilité de ne pas en rajouter et d’essaimer quelques touches de burlesque visuel – pas de mot, les dialogues se cantonnent comme toujours chez Tati à quelques borborygmes quasi-inaudibles – et de situations absurdes des plus efficaces. Pour tout dire, le dernier Tati se mesure avantageusement aux précédents."
( Critikat.com, sd).

Cécile Mury :

- "C'est bien lui, avec ses cernes mélancoliques, sa longue silhouette distraite. On reconnaît jusqu'aux pantalons, un peu trop courts, comme s'il avait continué de grandir à l'intérieur de son costume... Jacques Tati apparaît devant nous, réinventé en héros de dessin animé. Sacré tour de passe-passe, que Sylvain Chomet a mis sept ans à élaborer.
(…)
Cet Illusionniste est aussi tendre et contemplatif que les Triplettes étaient bouffonnes et inquiétantes. Mais on retrouve le regard oblique, le talent si particulier de Sylvain Chomet. Son tracé ébouriffé croque un personnage pittoresque en quelques mouvements : trognes des piliers de bar, dégaine du manager engoncé dans son costume à la mode, gestes fatigués d'un vieil artiste à bout de souffle. Surtout, le réalisateur a gardé son amour narquois pour tout un bric-à-brac rétro : vieilles guimbardes, devantures patinées et maisons de guingois. Ce monde d'hier flotte entre réalisme et poésie. Une brocante magique, patiemment « restaurée » à la main. Sylvain Chomet croit encore à l'ancienne magie, celle des lapins dans les chapeaux et des pinceaux sur les feuilles.
(Télérama, 19 juin 2010). 



Jean-Luc Douin :

- "Sylvain Chomet truffe avec malice cette histoire sans paroles (où tout est bruitages) de références à l'oeuvre de Tati. Le job d'appoint trouvé en Ecosse par l'illusionniste est celui d'un employé-garagiste déboussolé par la mécanique automobile (voir Trafic), aussi maladroit avec un tuyau que le Hulot des Vacances. Son achat d'un chapelet de saucisses est un rappel de Mon oncle, film projeté dans une salle d'Edimbourg où le héros entre jeter un oeil. Et où la métamorphose de la fille de la concierge en séduisante femme annonçait celle, ici, de la petite campagnarde écossaise en citadine amoureuse.
L'Illusionniste retrace en quelque sorte la vie d'un Tati qui connut le chômage et le ventre creux, fut contraint de décrocher des contrats à l'étranger, entre autres pour Parade (1974), où il rendait hommage au cirque. Un monde se meurt, qui voit le clown tenté par le suicide, le ventriloque vendre sa marionnette et finir comme un clochard, les trapézistes se reconvertir en peintres en bâtiment. Disparition d'un art, récupéré par la publicité, la société de consommation. Constat mélancolique que s'approprie sans doute Sylvain Chomet, adepte d'un style poétique n'ayant nul besoin du recours à la 3D."
(Le Monde, 15 juin 2010).

Arnaud Schwartz : 

- "C’est beau et drôle, doux et tragique, palpitant comme la vie et parfois vrillant de tristesse. Après Les Triplettes de Belleville, Sylvain Chomet déploie à nouveau toute la singularité de son talent. Il rend à Tati un bien bel hommage en donnant vie à ce projet enterré par le cinéaste, sans doute trop proche, trop sensible pour le grand escogriffe qui filma toujours du haut de sa pudeur."
(La Croix, 15 juin 2010).



Bande annonce.
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lundi 21 juin 2010

P. 300. La page nomade d'Amaryllis

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(Ph. JEA / DR).


Amaryllis et ses Bris de
Mo(t)saïques...

Sa responsabilité n'est pas négligeable même si elle ne lui est révélée qu'aujourd'hui.
Les "Bris de mots" d'Amaryllis resteront un sésame. La première porte entrebaillée puis ouverte sur les galaxies des blogs. S'y ancrent ou s'y tamponnent ou encore s'y déplacent en années lumière des quasi infinités de blogs en stock ou en révoltes, en révélations... Mais à l'origine, une seule étoile, celle d'Amaryllis, annonça ces mondes pas tous virtuels, multipliant les pluriels, avec chacun son rituel.
Donc premier blog découvert, première curiosité se métamorphosant en première fidélité que le temps n'érode pas. Restent intacts et vivaces et multiples les plaisirs de partager son écriture et ses illustrations-émotions.
Aujourd'hui, que la 300e page des mo(t)saïques l'accueille, n'est jamais qu'un juste retour aux sources...

Amaryllis ? Sa réponse :



- "Tableau de Raphaële Colombi.
Pourquoi Amaryllis ? C'est une fleur éclatante mais également le nom d'un papillon. Amaryllis est aussi une bergère chantée par Virgile dotée d'un sale caractère."

Sa voix :

Cliquer ICI quand elle lit du Michaux.

Sa page nomade :

- "Certains matins, elle grince car elle a besoin de sa dose minimum d'espoir pour se lever. Écrire sans réfléchir. Écrire sans intention évidente, sans réflexion, sans censure. Écrire sans encre délavée, en noir et rouge comme toujours. Écrire pour étirer, allonger le temps. Écrire pour se souvenir, pour murmurer ou crier. A Marie Ma Lys. Soupir. Écrire n'importe quoi, n'importe comment pour remplir. Les mots ne sortent pas, ils restent enfermés mais où ? Cerveau droit ou cerveau gauche. Ce n'est pas une question.
Elle délire, informe, difforme, déforme les mots, les sons. Qu'est ce que sont ses gribouillis, ses taches sur le papier? C'est une enfant, trop d'émotions, trop de miel. Elle hait le rose, le rose des corps, les écorchés, le rose poupée barbie, le chamallow, la guimauve, la barbe à papa (il n'a jamais eu de barbe, ce n'est pas celle là, c'est l'autre). Elle débloque les portes sans souci. Elle regarde le ciel et ses ratures. Elle préfère le peindre elle-même en bleu miracle. Où va-t-elle ainsi ? Dans un décor en carton. Attention, jeu dangereux, tu as déjà perdu et tu recommences. Tu, elle, toi, quoi ? Peut-on répondre ! Non, il faut chercher encore. Trouver le ton, le style. Le thon, elle l'a déjà mangé. il ne reste plus rien, plus rien. Elle pense en morceaux, ce sont des variations nocturnes sans musique. Elle marche sur un fil, somnambule. Tout le monde attend le moment où elle va tomber mais elle se rattrape toujours au dernier moment. Ils sont un peu déçus. Pas de sang, rien à raconter. Mais quand va-t-elle donc lâcher cette vie ? Elle y est attachée maintenant, alors elle se cramponne comme elle peut. Pourquoi ne le comprennent-ils pas ? Elle voit bien les ombres mais elle aperçoit aussi le soleil. Ne réfléchis pas, continue sur ta lancée de mots sans rapport avec toi, avec elle ; Toi c'est elle et elle c'est toi ... en même temps c'est quelqu'un d'autre, une jumelle que tu regardes et observes, détailles avec beaucoup de distance, sans amour. Qu'est ce que tu fais ? Une thérapie sauvage sans t'abandonner. Ensuite reconstruire, bâtir quelque chose de cohérent, élaguer. Franchir les chemins de traverse. Avoir des envies, être en vie. Continuer, prendre et rendre. Ne pas être dans le déni. Être un réceptacle des événements et les accepter, les écrire, les analyser. Perdre son doseur, son adoucisseur mais ne pas recommencer les erreurs. Se servir de son oeil comme d'une camera. Ne rien brusquer mais se comporter comme une espionne et éviter les plumes du paon et sa roue. Chercher la lumière qui fait avancer (ni celle trop brillante, ni la mate), l'accord qui fait résonner, les vibrations qui évitent les dissonances. Retirer les épines de l'oeil, les remettre sur la rose. Ce qui se dérobe en premier, ce sont les voix disparues. Braver le texte, lui tenir tête, le dompter. Ne pas éviter le monde comme elle le fait mais se cogner dedans, le prendre de face, face à face.
Ce ne sont pas des mensonges, juste le rajout d'une petite musique dans la réalité.
Un homme, une femme qui tombent, se sont-ils simplement trompés de sens ? et les sens giratoires ? Elle part vers des voyages trop subtils qui vont la laisser en plan ou sans carte. Pourtant avec les cartes routières où les GPS, elle ne peut plus se tromper ou est-ce le contraire ? Elle regarde avec insistance l'oeil de la lettre esperluette et la trouve belle, isolée, seule, craintive. Elle regarde les jours défiler et leur fait de l'oeil pense-t-elle, dit-elle, affirme-t-elle (sous-Duras pensent-ils !) Elle fait des bulles de phrases qui ne servent à rien. Elle écrit derrière une vitre ouverte et les lettres s'éparpillent les unes derrière les autres. Voilà tout a disparu et c'est tant mieux. Les pies continueront à jacasser."



Amaryllis : "Ombre porté" (DR).

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samedi 19 juin 2010

P. 299. De Gaulle, certes. Mais Churchill ???

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Winston Churchill, Mémoires de Guerre, T. 1, 1919-1941, Tallandier, 2009, 444 p.

Discours des 17
et 18 juin 1940

De ce côté-ci de la Manche, du moins en France, à toute question portant sur la date du 18 juin 1940, la réponse est spontanée et unanime : c'est "l'Appel de De Gaulle". Tout en relativisant grandement le nombre d'auditeurs réels ce soir-là sur le continent (1)...
Pour ne pas porter que des lunettes tricolores, si vous parcourez les livres d'histoire sur l'Angleterre - et Churchill en particulier -, vous y trouverez la confirmation d'autres discours, historiques eux aussi...

Churchill, le 17 juin 1940 à la BBC :

- "Les nouvelles de France sont très mauvaises et je souffre pour le vaillant peuple français qui est tombé dans ce terrible malheur. Rien ne modifiera nos sentiments à son égard, pas plus que notre foi dans une future résurrection du génie de la France.
Ce qui est arrivé en France n'altère en rien notre action et nos desseins. Nous sommes à présent le seul champion encore en armes pour défendre la cause du monde. Nous ferons de notre mieux pour nous montrer dignes de cet insigne honneur. Nous défendrons notre patrie insulaire et, avec l'aide de l'Empire, nous combattrons sans relâche jusqu'à ce que soit levée la malédiction qu'Hitler fait peser sur l'humanité. Nous sommes certains que tout se terminera bien." (2)

(Mont. JEA / DR).

Churchill, 18 juin 1940 :

- "Nous maintiendrons toujours (...) nos liens de camaraderie avec le peuple français (...).
Les Tchèques, les Polonais, les Hollandais, les Belges ont uni leur cause à la nôtre. Tous ces pays seront libérés (...).
Ce que le général Weygand a appelé la bataille de France vient de s'achever ; la bataille d'Angleterre est sur le point de s'engager. De cette bataille dépend le sort de la civilisation chrétienne, la survie de l'Angleterre, de nos institutions et de notre Empire.
Toute la violence, toute la puissance de l'ennemi va très bientôt se déchaîner contre nous. Hitler sait qu'il lui faudra nous vaincre dans notre île, ou perdre la guerre.
Si nous parvenons à lui tenir tête, toute l'Europe pourra être libérée, et le monde s'élèvera vers de vastes horizons ensoleillés. Mais si nous succombons, alors le monde entier, y compris les Etats-Unis, et tout ce que nous avons connu et aimé, sombrera dans les abîmes d'un nouvel âge des ténèbres, rendu plus sinistre, et peut-être plus durable, par les lumières d'une science pervertie.
Armons-nous donc de courage pour faire face à nos devoirs, et comportons-nous de telle sorte que, si l'Empire britannique et le Commonwealth durent mille ans encore, les hommes puissent dire "C'était leur plus belle heure". (3)


François Kersaudy, Winston Churchill, Tallandier, 2009, 715 p.

Notes :

(1) Pierre Assouline sur son blog :
- "...Son fameux appel radiophonique, que presque personne n’a entendu et dont on recherche en vain l’enregistrement par la BBC (peut-être sera-t-il un jour exhumé des archives soviétiques…)."
(18 juin 2010).

(2) Winston Churchill, Mémoires..., op. cit., p. 346.
4e de couverture :
- "Les Mémoires de guerre de Winston Churchill, sont à la fois une grande œuvre littéraire, un témoignage de première main par l’un des trois grands protagonistes de la Seconde Guerre mondiale, une reconstitution unique de cette guerre sur tous les fronts en Europe, en Afrique, en Russie, en Asie du Sud-Est, dans le Pacifique sud, jusqu’au Japon et une analyse concise de l’après-guerre jusqu’en 1957, par un homme d’Etat qui a été tour à tour acteur et témoin des faits qu’il rapporte. C’est cette œuvre plus que toute autre qui a permis à Winston Churchill d’obtenir le prix Nobel de Littérature en 1953.
Un large survol des événements de 1919 à 1939 avec une richesse documentaire et une beauté de style classique qui rend ce livre comparable aux Mémoires de Guerre du général de Gaulle.
Édition établie, introduite et commentée par le plus grand spécialiste de Winston Churchill : François Kersaudy."

(3) F. Kersaudy, Winston Churchill..., op. cit., p. 394.
4e de couverture :
- " « Nous sommes tous des vers », avait modestement confié le jeune Winston à une amie, « mais je crois que moi, je suis un ver luisant ! » Le mot n'est pas trop fort : Alexandre Dumas aurait pu inventer un personnage de ce genre, mais dans le cas de Winston Leonard Spencer-Churchill, la stricte réalité dépasse de très loin la fiction.
Jusqu'à 26 ans, les aventures du jeune officier et du reporter évoquent immanquablement celles de Tintin; mais ensuite, le personnage devient une synthèse de Clémenceau et de De Gaulle, l'humour et l'alcool en plus... ainsi qu'une imagination sans limites : « Winston, disait le président Roosevelt, a cent idées par jour, dont quatre seulement sont bonnes... mais il ne sait jamais lesquelles ! » C'est pourtant le général de Gaulle qui l'a le mieux jugé : « Il fut le grand artiste d'une grande histoire.»
Cette vie a été un roman; elle est racontée comme tel, sans un mot de fiction. Se fondant sur des recherches dans les archives de huit pays, la consultation de quelque quatre cents ouvrages et l'interview de nombreux acteurs et témoins, ce récit épique montre comment un homme solitaire, longuement façonné par d'exceptionnels talents et de singulières faiblesses, a pu infléchir le cours de notre siècle, avec la complicité d'un destin qui s'est radicalement départi de son impartialité."

jeudi 17 juin 2010

P. 298. Ardennes françaises : Mai 1940

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Couverture de Simon Cocu : "L'évacuation - 12 mai 1940" (DR).

N° 111 - Juin 2010 de
Terres Ardennaises :

Mai 1940

Sommaire des 104 pages :

- "Planifier l'exode" : l'évacuation des Ardennes en mai 1940 voulue par les pouvoirs publics.
Nicolas Charles.

- Un certain 13 mai 1940 à Monthermé.
Hubert Bureau et Nicolas Charles.

- Stauffenberg à Monthermé.
Christian Marry.

- Mai 1940 : Ernst Jünger à nouveau dans les Ardnennes !
Christian Marry.

- Une normalienne dans l'exode.
Marie-Thérèse Berger.

- L'évacuation de Mouzon, 10 au 12 mai 1940.
Anne François.

- L'exode un peu particulier des habitants d'Evigny.
Jacques Lambert.

- Quelques enfants dans l'exode.
Jacques Lambert.

"Ils" sont revenus avec leur cortège de ruines. Voir page 12, sans réf. (DR).

- Le lieutenant Henri Manceau en l'an 40.
Henri Manceau. Carnets de guerre annotés par Gérard Giuliano.

- Journal de Charles Lambert. De Nouzonville à Saint-Jouin-sous-Châtillon. Extraits.
Charles Lambert.

- L'été 1940 à Thin-le-Moutier.
Jean Diel.

- Les parlementaires ardennais et le vote historique du 10 juillet 1940.
Gérard Giuliano.

- Retour sur le 10 juillet 1940... et sa suite.
Simon Cocu.

- Les Ardennes dans les synthèses des rapports mensuels des préfets en zone occupée : 1940.
Jean-Emile Andreux.

- Mes souvenirs de la guerre 1939-1945.
Claudette Picot (Témoignage recueilli par Marie-France Barbe).

- Le Frontstalag.
Michel Meissneir.

- Un récit émouvant d'une amitié franco-allemande, née dans la tourmente de la Seconde Guerre mondiale.
Interview pour Terres Ardennaises.

Mouzon, p. 22, Ph. M. T. C. (DR).

Jacques Lambert :

- "... Nous souhaitions que l'essentiel des articles de cette revue soit consacré à la population civile. Nous racontons donc ces départs des villes et des villages, ces longs périples pour gagner les départements d'accueil, ces bombardements meurtriers, cette débrouillardise nécessaire pour s'en sortir, ces aides reçues pour atténuer les malheurs... Nous évoquons la vie des réfugiés en Vendée, dans les Deux-Sèvres et ailleurs, réfugiés qui ne souhaitent souvent qu'une chose : revenir chez eux le plus vite possible, en rusant s'il le faut. Un "chez eux" où manque un prisonnier, habitant quelque part en Allemagne, mais il est d'autres prisonniers en Ardennes !
La vie dans le département est difficile : nous le découvrons à Mohon et Thin-le-Moutier et nous en comprenons la raison essentielle à travers l'analyse des rapports des préfets : Les Ardennes constituent une sorte de grenier à nourriture confisqué au profit de l'occupant et de ses armées."
(Extrait de l'introduction, p. 1)

En quelques mots...

- Nicolas Charles décrit le pourquoi et le comment d'un plan de repli des Ardennais en cas de nouvelle invasion, plan "tombé à l'eau"".
- Hubert Bureau et Nicolas Charles soulignent, à travers l'exemple de Monthermé, "les nombreuses erreurs" d'un état-major français, celles-là mêmes qui débouchèrent sur un "rapide effondrement".
- A travers le journal de guerre d'Ernst Jünger, Christian Marry retrouve les souvenirs de son "passage" dans les Ardennes.
- En juin 1939, Marie-Thérèse Berger est reçue au concours d'entrée à l'ENF de Charleville. Sur 200 candidates, elles sont 25 admises... En 1940, la guerre entraîne l'exode de la jeune normalienne.
- "Que s'est-il passé à Mouzon dans les heures précédant l'évacuation ? Dans quelles circonstances les habitants ont-ils quitté la ville ?". Anne François apporte ses réponses.
- Jacques Lambert recueille les souvenirs de huit habitantes d'Evigny sur leur exode.
- Les premiers réfugiés sont... des Belges. Puis l'ordre d'évacuation touche les Ardennais de France. Départs à pied, avec brouettes, charrettes, poussettes... Ou encore à vélo. Quand ce n'est pas par train, ou pour d'aucuns en voiture. Les mitraillages et les bombardements font des victimes sans discernement. Autant de témoignages rassemblés par Jacques Lambert.
- L'exode par les yeux des enfants de moins de 14 ans, une synthèse de Jacques Lambert.
- Le lieutenant Henri Manceau dans ses carnets à la date du 18 mai 1940 : "Impression que Gamelin va être limogé : s'il a laissé inoccupée la ligne de la Meuse !!! à fusiller."
- Autre journal, celui d'un civil, Charles Lambert (de nationalité belge mais patriote... français). De Nouzonville à Saint-Jouin-sous-Châtillon. Du monde du travail en usine aux forêts et champs.
- Jean Diel s'attache à Thin-le-Moutier pour "cette période de flottement allant, grosso modo, de mai à septembre 1940".


Monthermé, p. 7, Ph. Coll. part. (DR).

- Le 10 juillet 1940, vote à Vichy pour substituer l'Etat français à la République. Méticuleusement, Gérard Giuliano répond à ces questions : "Quel a été le choix des six parlementaires ardennais présents à Vichy ? Et pourquoi trois autres parlementaires n'ont-ils pas pris part au vote" ?
- Grâce à Simon Cocu, plongée dans des archives de Maurice Voirin, député SFIO des Ardennes et maire de Mohon : "Dès le lendemain de l'assemblée, démentant la loyauté que les augures lui prêtaient, Pétain a trahi. Fut-ce l'effet d'une ambition sénile démesurée ou l'oeuvre d'un entourage pénétrant par effraction dans les rouages de l'Etat ?"
- Claudette Picot se confie à mon amie Marie-France Barbe. Exode et "une autre vie... celle de l'occupation".
- Le Frontstalag 190, celui de Charleville, sort de l'oubli grâce aux recherches, aux documents et aux illustrations de Michel Meissner.
- Ce n° 111 se clôture sur une présentation du récit signé par François Potier et intitulé : "La Clé de la Grange" (Ed. Cheminements - L'àpart Buissonnère). "Une tranche de vie... d'un ardennais de pure souche... prisonnier de guerre... et la famille de fermiers allemands chez qui il allait, chaque matin, manier la fourche ou soigner les bêtes."

Prix de vente de ce semestriel : 11 Euros.
Règlements à l'ordre de
Terres Ardennaises
CCP Châlons 3855-23-X

Terres Ardennaises
6 rue des Sources
08000 Charleville-Mézières
http://terres.ardennaises.free.fr
terres.ardennaises@free.fr

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mardi 15 juin 2010

P. 297. Quand la "défense des auteurs" se traduit par un film "symboliquement" déprogrammé

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Pour "Utopia"
impossible de trouver "sympa"
"à 5 heures de Paris"


Mon premier est film. D'amour incertain, improbable. Toute politique est absente des images. C'est un couple qui rêverait de voir Paris. Avec des chansons ringardes ou nostalgiques, selon les goûts et les couleurs.
Après que le sang ait hélas coulé au large de Gaza, mon second se traduit par une déprogrammation "symbolique" du film ne contenant pas une seconde sur le conflit entre Israéliens et Palestinens. Pas un seul mot de propagande. Pas l'ombre d'un soupçon de manipulation.
Mon tout est une France où un artiste est ciblé à cause de son passeport qui le rendrait complice d'événements à charge de son gouvernement.

Voici peu, nous eûmes un responsable politique socialiste qui se métamorphosa en chevalier des bonnes moeurs et, à Amiens, décréta l'interdiction d'une expo. 
Voici maintenant Utopia, ces "défenseurs du cinéma d'auteurs" établissant un tri entre ceux-ci et posant la condition que ces derniers aient un gouvernement changeant de politique... Ils vont avoir du boulot avec des cinéastes iraniens, chinois, américains, égyptiens, russes, congolais, turcs, vietnamiens, cubains pour n'en citer que quelques-uns...

Mon premier.

Synopsis :

- "A seulement 5 heures de vol de Paris, dans la banlieue de Tel-Aviv, deux solitaires se rencontrent. Lui est chauffeur de taxi. Elle est professeur de piano. Lui n’a jamais quitté Israël, elle est en transit entre deux pays. Lui a délaissé toute ambition, elle a abandonné ses illusions.
Tous deux redoutent l’avion qui les attend : il a la phobie des airs et doit pourtant s’envoler pour Paris où sera célébrée dans quelques jours la bar-mitsva de son fils, elle ne sait plus si elle doit prendre l’avion qui l’emmènera au Canada où son mari doit s’installer. Leur histoire d’amour est-elle une simple escale sans lendemain ou le point de départ d’une nouvelle vie ?"

Avoir-alire :

- "A cinq heures de Paris, réalisé par Leonid Prudovsky, est un long-métrage israélien qui se distingue des œuvres actuelles issues de ce pays, par le fait que le cinéaste exclut toute portée politique de son film ; le conflit israélo-palestinien (et plus largement les troubles au Proche et Moyen-Orient) n’y est évoqué d’aucune façon.
L’action aurait pu se dérouler n’importe où ailleurs dans le monde : cette comédie retrace effectivement les tribulations d’un homme et d’une femme, quadragénaires, maladroits, n’osant s’avouer leurs sentiments."

Diagonal Montpellier :

- "L’idylle qui se noue entre Yigal et Lina n’emprunte rien aux clichés de la comédie romantique américaine. Ici, c’est la complexité des relations amoureuses, décrite avec tendresse et humour, qui donne le ton. Porté par deux acteurs remarquables (Dror Keren dans le rôle de Yigal, parfait dans son rôle d’homme au charme discret, hésitant et parfois faible, et la belle et émouvante Elena Yaralova, impeccable en professeur de piano romantique et frustrée par une carrière de concertiste jamais réalisée), «A 5 heures de Paris» détonne dans un cinéma israélien habituellement plus axé sur des thématiques sociales, politiques ou historiques.
Preuve indéniable de son universalité, de sa maturité et de son étonnante diversité.

La musique est au coeur de ce film empli de charme et de sensibilité, entre vieux tubes français d’Adamo, Alain Barrière, Joe Dassin... chansons populaires russes et sonates de Beethoven et Chopin. Chacune correspond aux personnages qui vont se croiser et s’aimer dans ce long-métrage."


Leonid Prudovsky (DR).

Mon second.

Utopia :

- "Notre geste est symbolique et ponctuel. Cette décision collégiale a une signification précise : dire notre désapprobation concernant l'agression israélienne contre les navires pacifistes qui voguaient vers Gaza.
Nous n'avons rien contre ce gentil petit film, que nous nous engageons à programmer au premier signe de lever de blocus israélien de Gaza."

NB : Juste un mot pour dire, à mon estime, combien est élégante la formule de "gentil petit film" énoncée par ces "défenseurs du cinéma d'auteur". A se demander pourquoi ils avaient auparavant programmé un long métrage de fiction aussi dépourvu d'envergure.

Patrick Troudet :

- "Nous avons appris le raid au moment même où nous faisions notre programme dans lequel figurait A cinq heures de Paris. Il s’agit d’une comédie charmante sur laquelle il aurait fallu écrire un texte sympa, ce qui, sur l’instant, me paraissait impossible. Alors, nous avons pris la décision de le déprogrammer, pour attirer l’attention et dire notre désapprobation. C’était un geste symbolique, touchant ce film produit avec l’aide de l’organe de production officiel d’Israël."
(Utopia Bordeaux).

Les Inrocks :

- "Le réseau Utopia, spécialisé dans l’exploitation du cinéma d’auteur, entend faire l’impasse sur la sortie du film, dont la sortie en France est prévue le 23 juin prochain dans une quarantaine de salles. Les cinémas Utopia de province ont donc déprogrammé la comédie, entendant ainsi affirmer leur désapprobation des agissements d’Israël.
Une décision qui risque de faire polémique au sein de la communauté israélienne et plus largement auprès d’un public soucieux du respect et de la libre visibilité des œuvres, d’autant que le film semble dénué de nature partisane."

NB : Que faut-il comprendre par "communauté israélienne" ? Les juifs de France ? Il y a décidément des sujets qui font se renverser les encriers des confusions.

"Si tu es sage, tu iras au cinéma à Paris quand ils trouveront notre film fréquentable" (DR).

Mon tout.

Observatoire de la liberté :

- "Cette punition d'un auteur israélien revient à le rattacher de force à la politique et aux actes de l'État dont il est ressortissant".

Amos Schupak :

- "Etrangement le film déprogrammé n'a pourtant aucun caractère politique. C'est une banale comédie romantique dont les protagonistes sont un chauffeur de taxi et une professeur de piano qui se rencontrent dans une banlieue de Tel-Aviv.
Rien qui relève donc d'un soutien au gouvernement israélien, rien qui ait trait aux événements de ces derniers jours. Aucun fanatisme aveugle, aucune cécité idéologique.
Boycotter cette histoire d'amour balbutiante est ridicule. En outre, ce boycott culturel est absurde tant il va à l'encontre des principes de liberté et d'ouverture que prône Utopia."
(Rue89).

Ludi Boeken, réalisateur :

- "L'argent de l'état israélien, fédéré par l'Israeli Film Fund, aide à la production de films qui ne représentent en rien le gouvernement israélien. En effet, hors des films apolitiques, ce fond a aidé à la production des principaux films israéliens de contestation de ces dernières années et notamment Adjami, Valse avec Bachir, Lebanon, etc….
La droite et l'extrême droite israélienne ne font qu'attaquer ce fond afin de réduire au silence les cinéastes qui, en partie grâce à ce fond, luttent contre la politique gouvernementale actuelle en Israël.
Boycotter les artistes ne sert à rien, s'engouffrer dans cette voie ne sert que les intérêts des censeurs. De tous temps les artistes ont utilisés l'argent de l'état pour le critiquer. Métaphoriquement ou directement selon les régimes sous lesquels ils vivent, les artistes sont très souvent des combattants de la liberté."
(Lettre à Utopia).


Bande annonce.
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dimanche 13 juin 2010

P. 296. L'église fortifiée de Tavaux

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Au sud de la Thiérache et de sa prolifération d'églises fortifiées : le val de Serre avec les édifices militaro-religieux de Cilly, de Bosmont, de Tavaux et d'Agricourt.
Carte d'après : Sur une frontière de la France. La Thiérache. Aisne, Textes, Photographies et Cartographie sous la direction de Martine Plouvier, Association pour la généralisation de l'Inventaire régional en Picardie, 2003, 287 p.
(Montage JEA / DR).

Publiée le 13 mai
une treizième étape sur le chemin
des églises fortifiées de Thiérache :
Tavaux

Pour s'y rendre, le choix de manque pas :
par le nord, descendre la D 587 ou la D 25
de l'ouest ou, à l'inverse, de l'est suivre la D 58
du sud, remonter la D 25

(Ph. JEA / DR).

Première impression en se présentant à l'entrée ouest : Tavaux est pris dans une sorte de toile d'araignée tissée par une multitude de fils et autres câbles qui l'accablent...
Ici, l'expression évoquant l'église au milieu du village prend un sens assez écrasant...

Avant d'aller plus loin, un coup d'oeil sur les chiffres de service.
Tavaux : altitude 110 mètres au niveau du centre.
561 habitants pour une superficie de 25,7 km2.

(Ph. JEA / DR).

Monuments historiques :

- "L' église a subi de multiples remaniements au cours des siècles.
De l'église primitive du 12e siècle ne subsiste qu'une partie du massif occidental, présentant un grand clocher à baies en plein-cintre et muni d' un élégant triforium. Le clocher est épaulé de croisillons qui semblent être les seuls vestiges des bas-côtés de la nef aujourd' hui disparus, vestiges néanmoins fortement remaniés, puisqu' une tour a été accolée au croisillon nord aux 15e-16e siècles.
Quant au portail occidental, il a été refait à la même époque. La nef et le choeur ont été en grande partie reconstruits au 17e siècle."

(Ph. JEA / DR).

Quand la tour, forte de ses expériences accumulées au long de six siècles et soucieuse de dorer ses vieilles pierres, prend le soleil d'un printemps enfin décidé à se différencier d'un hiver jouant les prolongations...

(Ph. JEA / DR).

Loin de l'austérité lisse et rougeoyante de la très large majorité des églises fortifiées de la Thiérache qui, elles, accumulent les briques et ne s'accordent comme seules fantaisies que quelques motifs géométriques, à Tavaux, les pierres prennent figures angéliques ou humaines (nous n'allons pas confondre quand même). 
Et parlent. Du moins suggèrent. Avec du définitif dans leurs messages. Comme des mots figés.

(Ph. JEA / DR).

Dans les rares écrits sur cette église, nulle allusion à ce que Tavaux ait offert une étape, ou du moins se soit situé sur un chemin vers Saint-Jacques de Compostelle... Mais la coquille décorant le porche d'entrée est surdimensionnée. Ne laissant pas de place à on ne sait quel hasard. Hélas, les pollutions y déposent leurs lèpres. Lesquelles rongent la pierre. Celle-ci perd l'envie de danser les nuits de pleine lune, quand seuls les fantômes de loups anciens se glissent entre les arbres assoupis et que s'envolent les souvenirs de toutes ces chouettes clouées à des portes superstitieuses.

(Ph. JEA / DR).

Pour franchir ce porche rendu aveugle, les gens venaient :
des Longues Raies,
du Mont Revers,
des Croyons,
du Bois de Rary, du Bois de la Croix, ou du bois des Hoyaux, 
du Caillou,
de Molembur,
des Dix Jallois,
de la Côte des Chaudriers,
des Terres de Malaise ou de la Terre aux Navets,
de la Croix de Montcornet,
du Fond de la Maye,
de la Pâture…

(Ph. JEA / DR).

Dans le cimetière encerclant l'église, la tombe de Marcel Charmet :
- "Tué par les Allemands le 30 août 1944 à l'âge de 18 ans".

Le Courrier Picard :

- "Le 30 août 1944, un détachement de panzers SS des divisions Hitlerjugend et Adolf Hitler, qui recule depuis la Normandie, est accroché par des résistants locaux. En représailles, le commandant de l'unité allemande - dont le nom n'a jamais été retrouvé - fait tirer au canon sur les maisons de Tavaux et ordonne l'exécution de vingt habitants dont deux enfants, une fillette et un garçon âgés de 6 ans.
Le lendemain à Plomion, les SS aux abois perpétuent un autre massacre : quatorze habitants sont fusillés et leurs maisons incendiées. Et le 2 septembre, pour répliquer à une attaque des résistants dans le hameau du Gard sur la commune d'Etreux, les SS fusillent trente-six habitants et brûlent fermes et écarts."
(15 novembre 2009).

Alain Nice :

- "Tavaux, Plomion et Etreux font partie des nombreux villages martyrs de France, au même titre qu'Oradour-sur-Glane.
Après la Libération, le village de Tavaux a été décoré de la médaille de la Résistance. Le nom de Tavaux figure en lettres de bronze dans le mémorial de la Résistance de Vassieux-en-Vercors."
(Alain Nice, Tavaux 30-31 août 1944. Histoire d'une tragédie, Préface de G-H Lallement, ouvrage édité à compte d'auteur, édition revue et augmentée, 2009). 

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vendredi 11 juin 2010

P. 295. Rencontre avec 3 femmes écrivains

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A comme lits et rAtures (Ph. JEA / DR).

Laurence Thirion
Colette Nys-Mazure
et Christine Van Acker
au Cercle de la Rotonde
ce samedi 12 juin à 17h

Au 28 de la rue de Rome à Ixelles (près du Parvis St Gilles), se tiennent des rencontres avec des plumes à découvrir derrière les couvertures et les pages de leurs livres. Les tours d'ivoire s'entrouvrent. Des mots et des idées et des rêves sont échangés sans intermédiaires...
Débouchant sur des entretiens, des lectures, des débat avec le public mais aussi des signatures, cette initiative est portée par le Cercle de la Rotonde, en partenariat avec La Maison Du Livre.
Samedi prochain, trois femmes écrivains y feront écouter leurs littératures originales.
La première est presque connue des lecteurs (masc. gram.) de ce blog. En effet, de Laurence Thirion, vous trouverez des traces sur les pages 247, 219 et 100... Dont cet extrait d'une brève présentation :

Laurence Thirion

- "Laurence lisait comme d'autres respirent. Tête dans les nuages des pages. Se glissant sur l'eau complice, Παντα ρει και ουδεν μενει. La péniche se métamorphosait en bateau livre.
Jusqu'à cette fête de la musique, dans un Charleville méconnaissable et complice du fleuve. Elle disparut vraiment. Partie à la recherche d'un Rimbaud peut-être de retour, incognito, redevenu inspiré, encore plus désespéré.
En résumé, en notre Athénée héritier de trois siècles, sa classe s'agitait quand il s'agissait de sortir des cours un peu trop courts. Son appétit juvénile demandait aussi que soit mis au menu le Boris Vian du Goûter des généraux..."

Laurence Thirion, Absences, Memory Press, 2008 (Mont. JEA / DR).

4e de couverture :

- "Sept maisons en tout et pour tout dont deux en ruines et pas un chat dehors.
Michel, un enseignant bruxellois découragé, a trouvé dans un hameau du Larzac un désert pour faire le deuil de Paul, son fils de vingt-huit ans. Par delà la mort, l'espace, les générations, des liens se tissent et perpétuent la vie."

Extrait :

- "On ne retient pas les morts, quoi que l’on fasse. Si la tristesse reste intacte néanmoins, l’instinct de survie la range dans un coin de notre cerveau et la ressort parfois à l’improviste comme un livre familier que l’on feuillette de temps à autre et qui trouve sa place dans la bibliothèque de notre vie. La poussière le recouvre, on le nettoie de temps en temps, le texte n’a pas changé et l’émotion qui l’accompagne ne s’est pas émoussée malgré les années écoulées. Néanmoins, le sage choisit la vie et sait que cette lecture est contraire au bonheur. Il s’impose donc de ne lire ce récit que très rarement quand il se sent la force de supporter ses larmes et cette absurdité.
(…)
Paul est mort, la rivière coule toujours, limpide et belle, le soleil s’émerveille de cette beauté et les lézards se pâment sous son éclat.
Si Michel ne profite pas de ces instants, ce tableau idyllique ne sera pour personne. La vie doit triompher, rien ne sert de la traîner jusqu’à son agonie, dans la morosité et les regrets.
Il ne trahit pas Paul s’il choisit de vivre, il le continue !"

Présentation par le Cerle :

- "Jeune romaniste belge, douée de sa plume et du pinceau, son premier récit Absences est paru chez Memory Press en 2008, bien qu’il ait été commencé en 1999, à 21 ans… A la fois modeste et ambitieux, ce roman explore la vie d’un homme mûr, Michel, en retraite dans l’aridité du Larzac, où il se remémore ses épreuves, dont la plus brûlante fut la mort de son fils adoptif. La venue de visiteurs et la correspondance avec une jeune femme blessée, vont peu à peu tirer Michel de sa léthargie. Les temps du passé alternent en permanence avec le présent ; les souvenirs sont tissés de désirs latents."


Colette Nys-Mazure, Perdre pied, DDB, 2008 (Mont. JEA / DR).

Colette Nys-Mazure, 4e de couverture :

- "Tous les chemins mènent à la mer.
Sur cette plage du Nord, un peintre a posé son chevalet. Il peint le ciel changeant, les silhouettes en vacances. Mais voici qu'un cheval fou fend l'espace et révèle à chacun sa part de rêve et de souffrance. Résidents ou locataires, qu'on ait cinq ou soixante-quinze ans, il arrive qu'on perde pied : on se pose les questions vitales et on cherche un écho près des autres. Le jeune homme en fauteuil roulant écoute l'adolescente en mal de père ; une famille nombreuse joue non loin d'une femme esseulée ; un couple savoure la joie de vieillir ensemble.
Les solitudes sont avides d'attention, de tendresse et d'apaisement. Mais comment reprendre pied lorsque la vague trop forte a bousculé le fragile équilibre ? Dans ce roman, l'auteur de Célébration du quotidien poursuit son exploration des visages et des paysages, des choses de la vie, en quête de l'essentiel sous les apparences."

Extrait :

- " Julian a senti venir l'orage. Au moment de fermer la porte-fenêtre, il a vu se lever les paumes, les visages ravis aux yeux clos de Tom et de Mathieu recevant les premières gouttes très larges, annonciatrices du déferlement. Les enfants immobilisés sur la digue et la voix vigilante :
- Rentrez vite, vous allez être trempés !
Julian courant nu dans le jardin sous l'averse d'été, rattrapé par sa mère. Mon petit fou. Enveloppé d'une serviette aussi bleue que la fleur de lavande dont elle glissait des sachets dans l'armoire emporté au sec, au sûr, mais encore ébranlé par l'éclair, le tonnerre, la trombe. Elle aussi, les cheveux ruisselants l'odeur de la pluie.
Ce soir, ciel et plage lessivés à grande eau, personne pour goûter la fraîcheur revenue où sont passées les mouettes ? Dans l'obscurité montante, le sable devient noir. Rien que les chalutiers et la lumière tournante d'un phare pour affronter la nuit. Tout manque tu as vécu dans des chambres transies, tu as cru y mourir et soudain te voici au vide central traversé d'appels. Sous la porte, quelqu'un a glissé une feuille de papier : le dessin d'un cerf-volant très coloré survolant les jambages malhabiles d'une déclaration : Julian, je t'aime, qui n'a pas besoin de signature. À l'horizon, septembre, sa solitude, sa rigueur. Aurai-je assez de force ?"

Présentation par le Cercle :

- "L’écrivaine tournaisienne, dont la renommée s’est étendue bien au-delà des frontières belges et françaises, avec des essais comme Célébration du quotidien ou Secrète présence, signe un premier roman, Perdre pied (Desclée de Brouwer, 2008) écrit en résidence à Rome, ainsi qu’un livre « d’images et de mots », À nous deux ! (Bayard, 2008), destiné à créer des liens entre « les enfants d’aujourd’hui et les enfants d’hier ». La trame narrative des récits de l’écrivaine est subtile, suggestive comme sa poésie, allant à l’essentiel par petites touches légères. On n’en sort jamais tout à fait indemne; l’émotion affleure au détour d’une phrase, d’un mot : si juste."


Christine Van Acker, Bateau-ciseaux, Ed. Esperluète, 2007 (Mont. JEA / DR).

Christine Van Acker, 4e de couverture :

- "Au gré des moments quotidiens ou des événements exceptionnels se tisse une réalité particulière, celle d’une enfance sur une péniche. C’est un milieu simple où le travail occupe toute la place et que les livres viennent bousculer.
Ce récit raconte l’enfant dans sa construction vers l’âge adulte : sur la péniche, au pensionnat, avec ceux «d’à-terre»,... et surtout à travers la découverte de la lecture. Ce cheminement, de l’apprentissage à l’exploration personnelle, nous touche par sa fragilité, ses tâtonnements mais aussi par sa détermination à étancher une soif de découvertes initiée par la lecture."

Extrait :

- "Le passé avance.
Issue de cette matière agitée, hissée par le vivant, je suis née.
Des oubliés m’ont portée à terme.
Ma nature profonde en porte les semis, dormants ou prolifiques.
La mémoire trace ses sillons, égratigne au passage, s’étrangle ou se répand.

Les livres appartiennent à ces invisibles qui m’ont faite.
Ils sont la connivence quand je n’en avais avec personne.
Ils sont le voyage quand je ne pouvais pas encore tenter l’évasion.
Ils sont ces parts de moi-même que j’aurais pu ne pas voir.
Ils m’ont amenée ici."

Présentation par le Cercle :

- "L’auteure du merveilleux récit auto-biographique Bateau-ciseaux (Esperluète, 2007, avec des encres de Vero Vandegh), relatant avec un humour doux-amer son enfance sur une péniche, est aussi animatrice d’ateliers d’écriture et créatrice de l’asbl Les Grands Lunaires, publiant des livres, visuels et sonores, ainsi que des documentaires radio - comme « La dernière pierre » (publié aux Carnets du Dessert de Lune, 2009) - salués par de nombreux prix.

Entrée libre pour cette rencontre.

Site : www.lecercledelarotonde.be ou via La Maison du Livre, 28 rue de Rome, 1060 Bruxelles.

Tél : 02/543.12.24 Site : www.lamaisondulivre.be (Pré-métro : Parvis St Gilles).

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