Insigne de la Ligue des Croix de Feu que dirigea le Colonel de La Roque (DR).
15 juin 1941.
François de La Roque.
- "Je ne suis pas gaulliste. Pourquoi ? Parce que gaullisme signifie dissidence, insurrection, révolte contre les pouvoirs légitimement constitués (…) ; parce que le gaullisme se réclame à outrance des principes de 89 et du Front populaire de 1936 ; parce que le gaullisme ne fait qu’un avec la Juiverie et la Franc-maçonnerie ; parce que les gaullistes sont les faux frères à la solde de l’Angleterre, ils ont comme Caïn les mains teintées du sang d’Abel."
Le Petit journal, article intitulé « Unité française ».
(1).
Gendarmes sur un quai de la gare d'Austerlitz, mai 1942. Un convoi doit partir pour Pithiviers... (DR).
Poitiers, 16 juin 1941.
Rapport du capitaine Riffaud, commandant provisoirement la compagnie de gendarmerie de la Vienne.
- "Dans une affaire récente de vols, où étaient mêlés les quarante juifs étrangers d’une commune, l’auteur n’a pu être retrouvé. Par contre, l’un d’eux a été pris pour trafic illicite en police économique au moment où il allait partir. Tous ces Juifs amenés dans le département par les Allemands, seraient mieux dans un camp de concentration."
(2)
1er juin 1942.
Jean-Pierre Aumont.
- "Amérique, pays des maisons sans escalier et des arbres sans fruits. Pays de la confiance en son prochain, de l’hospitalité, des ligues, des sectes, des complexes d’infériorité, où l’on tolère qu’un nègre soit lynché, mais non qu’une jeune fille vende son corps. Pays de la gentillesse, mais non de l’amitié, où ne prospèrent ni la tricherie, ni le système D, où le vol n’existe qu’à la plus haute échelle. Amérique fière d’elle-même et pleine de respect étonné envers l’Europe.
Amérique bonne enfant, où les « cops » trinquent avec les délinquants. Amérique pudibonde où les garçons boivent du lait jusqu’à vingt ans, si bien que le moindre whisky, par la suite, les fait tituber. Amérique conventionnelle où tout ce qui sort de la norme est suspect. Amérique casanière, chauvine, effrayée de ce qui vient d’ailleurs, mais si forte qu’elle l’absorbe immédiatement, qui croit à l’astrologie, au marc de café et à l’énergie atomique, mais ne sait pas débattre de ses propres sentiments.
Pays de l’hygiène et de l’obéissance, où on ne fume pas s’il est écrit « Défense de fumer », où on ne traverse pas les rues au signal rouge, où l’on va se faire tuer sans savoir pourquoi, à Guadalcanal ou aux Nouvelles-Hébrides."
(3).
8 juin 1942.
Hélène Berr.
- "Mon Dieu, je croyais que ce serait plus dur (4).
J’ai eu beaucoup de courage toute la journée. J’ai porté la tête haute, et j’ai si bien regardé les gens en face qu’ils détournaient les yeux. Mais c’est dur.
D’ailleurs, la majorité des gens ne regarde pas. Le plus pénible, c’est de rencontrer d’autres gens qui l’ont. Ce matin, je suis partie avec Maman. Deux gosses dans la rue nous ont montrées du doigt en disant : « Hein ? T’as vu ? Juif. » Mais le reste s’est passé normalement (…).
J’ai repris le 92. Un jeune homme et une jeune fille attendaient, j’ai vu la jeune fille me montrer à son compagnon. Puis ils ont parlé.
Instinctivement, j’ai relevé la tête – en plein soleil -, j’ai entendu : « C’est écoeurant. » Dans l’autobus, il y avait une femme, une maid {domestique} probablement, qui m’avait déjà souri avant de monter et qui s’est retournée plusieurs fois pour sourire ; un monsieur chic me fixait : je ne pouvais pas deviner le sens de ce regard, mais je l’ai regardé fièrement.
Je suis repartie pour la Sorbonne : dans le métro, encore une femme du peuple m’a souri. Cela a fait jaillir les larmes à mes yeux, je ne sais pourquoi."
(5).
Hélène Berr.
- "Mon Dieu, je croyais que ce serait plus dur (4).
J’ai eu beaucoup de courage toute la journée. J’ai porté la tête haute, et j’ai si bien regardé les gens en face qu’ils détournaient les yeux. Mais c’est dur.
D’ailleurs, la majorité des gens ne regarde pas. Le plus pénible, c’est de rencontrer d’autres gens qui l’ont. Ce matin, je suis partie avec Maman. Deux gosses dans la rue nous ont montrées du doigt en disant : « Hein ? T’as vu ? Juif. » Mais le reste s’est passé normalement (…).
J’ai repris le 92. Un jeune homme et une jeune fille attendaient, j’ai vu la jeune fille me montrer à son compagnon. Puis ils ont parlé.
Instinctivement, j’ai relevé la tête – en plein soleil -, j’ai entendu : « C’est écoeurant. » Dans l’autobus, il y avait une femme, une maid {domestique} probablement, qui m’avait déjà souri avant de monter et qui s’est retournée plusieurs fois pour sourire ; un monsieur chic me fixait : je ne pouvais pas deviner le sens de ce regard, mais je l’ai regardé fièrement.
Je suis repartie pour la Sorbonne : dans le métro, encore une femme du peuple m’a souri. Cela a fait jaillir les larmes à mes yeux, je ne sais pourquoi."
(5).
A G. : Paulette Zelasneg, le port de l'étoile était obligatoire à partir de 6 ans. Cachée dans la Creuse, cette enfant fut sauvée de la Shoah. A Dr. : mariage de Louise Béhar en 1942. Elle a été déportée sans retour à Auschwitz, avec son bébé (Montage JEA / DR).
21 juin 1943.
Consignation par le SS Sturmbannführer Hagen, d’un entretien le 16 juin avec le Dr Ménétrel, médecin personnel de Pétain.
- "En ce qui nous concerne nous avons fait remarquer à Ménétrel que l’expérience avait montré, et dans tous les pays, que, si on laissait aux Juifs une possibilité quelconque de trouver un emploi, ils avaient tôt fait de jouer un rôle déterminant dans la vie économique et d’occuper des postes importants.
Ménétrel s’est rallié sans restriction à cette conception des choses et a déclaré qu’en tant que personne privée il admirait la décision allemande prise au sujet de la solution de la question juive en vue de déraciner définitivement la juiverie."
(6).
Nevers, 3 juin 1944.
Rapport du chef d’escadron Meygret-Collet, commandant la compagnie de gendarmerie de la Nièvre.
- "Les forces terroristes semblent redoubler d’activité dans l’arrondissement de Château-Chinon par rapport au mois précédent (vingt-huit attentats ont été commis contre dix le mois dernier).
Quelques bandes fortes, nombreuses, bien équipées et bien armées, ont été identifiées dans les bois de l’arrondissement de Château-Chinon, et il semble que dans cette région on se trouve devant un regroupement de forces diverses. Les marchandises emportées par ces individus sont presque toutes payées.
Des opérations menées par des effectifs importants de l’armée d’occupation, notamment à Arleuf et à Blismes, n’ont guère donné de résultats (deux tués à Arleuf) et les pertes subies sont aussi fortes que les résultats obtenus."
(1).
Regard de Simone Veil (Cadrage JEA / DR).
7 juin 1944.
Simone Veil.
- "Nous avons appris, dès le 7 juin je crois, que les Alliés venaient de débarquer. Le bruit en avait couru. Ce jour-là, c’est un fragment de journal reproduisant la carte de la côte normande et précisant les lieux du débarquement que j’ai ramassé par terre. Je demeure convaincue que la femme SS qui nous surveillait l’avait laissé traîner à dessein."
(7).
7 juin 1944.
Simone Veil.
- "Nous avons appris, dès le 7 juin je crois, que les Alliés venaient de débarquer. Le bruit en avait couru. Ce jour-là, c’est un fragment de journal reproduisant la carte de la côte normande et précisant les lieux du débarquement que j’ai ramassé par terre. Je demeure convaincue que la femme SS qui nous surveillait l’avait laissé traîner à dessein."
(7).
NOTES :
(1) Colonel. A la tête des Croix de Feu. Cette ligue (1931-1936) fut dissoute par le gouvernement de Front populaire. Créa en 1936 le Parti social français qui prit déjà pour devise : « Travail – Famille – Patrie »… « Le Petit journal » était l’organe de ce parti.
(2) Jean-Marie Pontaut et Eric Pelletier, Chronique d’une France occupée, 1940-1945, Les rapports confidentiels de la gendarmerie, Michel Lafon, 2008, 734 p.
(3) De son vrai nom Jean-Pierre Salomons (1911-2001).
Jean-Pierre Aumont, Souvenirs provisoires, Julliard, 1957, 419 p.
L’auteur était aux côtés du général Brosset lors de son accident mortel du 20 novembre 1944. Voir la page 124 de ce blog.
L’auteur était aux côtés du général Brosset lors de son accident mortel du 20 novembre 1944. Voir la page 124 de ce blog.
(4) Premier jour du port obligatoire de l’étoile de David.
(5) Hélène Berr, Journal, Tallandier, 2008, 342 p.
L’auteur a été arrêtée le 8 mars 1944. Déportée à Auschwitz puis transférée à Bergen-Belsen le 3 novembre. Elle décède sous les coups d’une gardienne cinq jours avant la libération de ce camp (avril 1945).
L’auteur a été arrêtée le 8 mars 1944. Déportée à Auschwitz puis transférée à Bergen-Belsen le 3 novembre. Elle décède sous les coups d’une gardienne cinq jours avant la libération de ce camp (avril 1945).
(6) Serge Klarsfeld, Le calendrier de la persécution des Juifs de France, septembre 1942-août 1944, T. 3, La Shoah en France, Fayard, 2001, 2029 p.
Herbert Martin Hagen (1913-1999) est alors chef de la section anti-juive avec le grade de major SS. Bernard Ménétrel (1906-1947) cumule les fonctions de médecin personnel, de secrétaire particulier et de confident de Pétain.
(7) Simone Veil, Une vie, Stock, 2007, 398 p.
5 commentaires:
in memoriam.
Et sans que ce soit semblable ni comparable ne jamais se laisser aller à aucune éclusion, systématisation, stigmatisation qui sont autant de marches, chacune ignoble à sa façon, sur le chemin qui mène à cela
@ brigetoun
- "Trop souvent l'Europe considère que la Shoah est la tragédie des seuls juifs, sans réaliser qu'elle est aussi le drame de son propre effondrement, car l'Europe qui se reconstruit peu à peu, restera longtemps encore, quels que soient les régimes politiques et la prospérité, un baraquement de chantier en préfabriqué, parmi les ruines de ce qui fut l'architecture même de l'esprit."
Alain Fleisher
("Les Angles morts". Seuil)
L'Europe a choisi de détruire une partie d'elle-même. Elle en sera apauvrie à jamais.
Plus encline à commémorer qu'à s'émouvoir de l'antisémitisme au présent.
Bien réel, s'exprimant quotidiennement. Les foules qui emplirent les rues après Carpentras ont-elles trouvé l'exercice fatigant ? Les rues sont désertes quand des enfants doivent changer d'école. Parce que Juifs et en butte aux agressions. Les rues sont désertes quand ils se font chasser d'un parc. Il y aurait mille exemples.
Le chemin était tracé, il y a des décennies qu'il a été emprunté. Pour mieux en détourner le regard on use à l'envi de ce mot : communautarisme. Traduire : laissons seuls les Français Juifs. Quelques formules désolées et polies, rien de plus. Les rues resteront désertes.
Merci de ce bel article JEA.
Il est vrai que les parcs publics interdits aux petites étoiles, et les écoles aryanisées de force (ni enseignants, ni élèves supposés d'origine juive)... la France, ou du moins l'Etat Français, ont déjà "donné".
Ou alors, tombe du ciel élyséen un autre extrême : obliger un gosse à porter tout le poids en cendres d'un autre gosse jadis gazé à Auschwitz.
Pendant ce temps, des devises ont toujours de beaux jours devant elles. Travail forcément volé par les "autres" (immigrés ou comploteurs). Famille prétexte de tous les discours réactionnaires. Patrie nostalgique des militaires au pouvoir, de la répression des droits de l'homme, des colonies et de la presse aux bottes.
Les rues sont vides. Pas les blogs.
Caen le 6 juin avait une couleur bien particulière ...
Un billet finement écrit comme un cri sourd en fond de bottes et d'étoiles ...
Bravo M'sieur :o)
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