(Ph. JEA / DR).
« Pourquoi ne pas imaginer, le 1er vendredi de chaque mois, une sorte d’échange généralisé, chacun écrivant chez un autre ? Suis sûr qu’on y découvrirait de nouveaux sites… ».
Ainsi sont nés les vases communicants, à l’initiative de François Bon et de Scriptopolis .
Aujourd’hui, après la page 209, Zoé Lucider est accueillie à nouveau dans Mo(t)saïques tandis que je laisse fondre quelques flocons de neige sous son Arbre à palabres.
Zoé Lucider : Identité notionnelle.
- "Elle est née quelque part, certes, mais elle n'y est pour rien et même aurait préféré naître ailleurs, un goût prononcé pour l'exotisme.
Elle a grandi mais on l'y a poussé. Elle a eu beau freiner des quatre fers, elle a bien été obligée de se redresser et aussi bien, commencer à prendre langue puisque c'était décidément plus efficace que les cris et les borborygmes pour obtenir du pain et des jeux.
Elle a chanté, on a prétendu qu'elle le faisait bien. Toute musique entrant dans son oreille ressortait par sa bouche. Elle était la mémoire familiale. Comment c'est déjà, tu sais bien cette chanson ? Elle s'exécutait.
Elle a dansé, son corps souffrait de trop de raideur si elle ne lui donnait pas de l'exercice, danser lui était aussi indispensable que courir et plus compatible avec les espaces confinés.
Elle a écrit, sur le plâtre frais que son père appliquait sur les murs, il admirait la performance et haussait les épaules quand sa mère protestait. Le graffiti comme méthode, en droite ligne des cavernes
Elle a aimé les livres. Elle lisait avant de savoir lire. Elle se promenait avec un livre quand elle n'aurait pu en déchiffrer un mot. Elle harcelait son frère pour qu'il lui apprenne et quand enfin elle entra à l'école, elle considéra avec mépris ces morveux accrochés aux basques de leur môman et braillant comme à l'abattoir.
Elle a aimé l'école, ah oui, elle trouvait passionnant tout ce qu'on y apprenait. Tout, sans exception. Le monde s'ouvrait enfin, immense, et elle allait y faire une grande carrière de vivante si elle ne mourait pas tout de suite, car cette perspective l'accompagnait tous les jours. Vis comme si tu devais mourir demain.
Elle a su très tôt qu'elle ne resterait pas toute sa vie au bord de cet Atlantique dont pourtant elle aimait les rochers, les dunes, l'iode et le bruit des vagues.
Elle a désiré Paris, la ville prodige, où on peut façonner un destin, autre chose que cette province où la rumeur tenait lieu de pedigree. Paris, la joie de son immersion à peine ternie par la souffrance de ses oreilles et de ses sinus, sursaturés d'émanations, le bruit et l'odeur. Paris les quais, les lumières, les bars, les musées, la cinémathèque, les petits restaurants où elle avait ses habitudes et une ardoise, les chambres sous les toits d'où elle tutoyait les pigeons.
Elle a voulu connaître le vaste monde et s'y est risquée avec peu de moyens et les yeux plus grands que le ciel.
Elle a donné la vie après avoir longtemps hésité, parce qu'elle craignait de perdre sa folle insouciance, ce qui advint.
Elle s'est employée en harangues et gesticulations afin de faire mousser d' improbables utopies, en particulier celle d'un monde où les frontières seraient tracées au bolduc.
Elle a divorcé de la Capitale, elles ne sauraient vieillir ensemble.
Et la voici, juchée sur une petite colline, contemplant le couchant et ne sachant toujours pas si elle est ce qu'elle croit être, ou celle que les autres croient voir.
J'oubliais. Ses papiers sont estampillés d'origine contrôlée et depuis longtemps déjà, on ne les lui réclame plus."
(Ph. JEA / DR).
Les participants aux vases communicants de janvier 2010 :
Futiles et graves (Anthony Poiraudeau) et Paumée (Brigitte Célérier),
Tiers Livre (François Bon) et Ce métier de dormir (Marc Pautrel),
Petite Racine (Cécile Portier) et Abadôn (Michèle Dujardin),
Tentatives (Christine Jeanney) et Enfantissages (Juliette Zara),
Elle-c-dit et Fut-il ou versa t’il dans la facilité ? (Christophe Sanchez),
C’était demain (Dominique Boudou) et Biffures chroniques (Anna de Sandre),
Terres… (Daniel Bourrion) et Journal Contretemps (Arnaud Maïsetti),
Liminaire (Pierre Ménard) et Jours ouvrables (Jean Prod’hom),
Pendant le weekend (Hélène Clémente) et Oreille culinaire (Isabelle Rozenbaum),
Les beautés de Montréal (Pierre Chantelois) et L’Oeil ne se voit pas lui-même (Hervé Jeanney)
Le blog à Luc (Luc Lamy) et Frédérique Martin .
38 commentaires:
Des frontières dessinées au bolduc ? Joli, mais quand souffle le vent d'Est... Aïe je manque de place !
Tum-bala, tum-bala, tum-balalaika ♪♪♪
superbe (un petit reproche à vous deux : vous êtes si discrets que manquez sur les listes) vous rajoute
@ Elisabeth.b
il est hélas à craindre que l'un de vos commentaires n'ai été une victime du passage à niveau par lequel passa le TGV de l'an nouveau...
que vos jardins et vos chemins restent ces espaces uniques où même les perles parlent de culture...
@ brigetoun
plutôt que de vases communicants entre la colline de Zoé et mon hameau, il serai plus exact d'évoquer un ruisselet de nuages...
Mais pourquoi est-ce sur ma tête qu'ils tombent ?
Vous le voyez, ni les nuages ni le commentaire ne se sont perdus...
@ Elisabeth.b
les nuages n'ont pas leur pareil pour tourner les plages comme des pages...
Ruisselets, frontières de bolduc... et la perle au jardin qui se met à chanter. Vraiment,
l'année commence sur un ruisselet d'étoiles... Et sous l'arbre à Zoë (Ah! Zoë !!! le domaine admirable) nous irons souvent palabrer
"identité notionnelle" ! bravo ! vous commencez très fort, JEA !
Je vous envoie un g(r)o é l a n.
C'est un accompte de mes prochains voeux officiels qui ne seront pas aussi délirants ni ardents que ceux de qui vous savez. Mais sincèrement le coeur y est.
Tout le meilleur pour vous, en 2010.
Bien Amicalement.
@ frasby
votre enthousiasme me prête l'identité notionnelle rédigée par Zoé...
par contre votre photo d'élan rappelle le cerf 17 corps qui vient de se suicider à la chevrotine dans les forêts de Gespunsart (une histoire de braco contre président de chasse et qui défraie la chronique locale)
pour se consoler : l'espoir de l'une de vos pages qui nomadisera bientôt jusqu'à ce blog
Bravo Zoé, tout simplement. ET bonne année, of courses, ainsi qu'à Jean, le grand Maître des lieux. Pourriez-vous rajouter notre échange avec Luc Lamy ?
@ Frédérique M.
Incapable de reproduire une simple liste : me voilà pris en flagrant délit !
Les vases ne sont plus orphelins de votre échange avec Luc. Mais je garde le rouge au front...
J'adore ! (et vous rajoute tous deux à ma liste honteusement incomplète)
Oh ce n'est pas si grave Jean, et puis le rouge vous va si bien.
On connaissait les Z.A.C. et les Z.U.P., mais pas encore la Z.O.C., la Zoë d'origine contrôlée !
On se prend à rêver d'être directeur des ressources humaines et de n'avoir à lire que des curriculum vitæ de la sorte...(Mais le rêve s'arrête là où il commence, i.e ici).
ArD
@ Frédérique M.
le rouge à Jean
et le noir à Emile...
@ Anonyme
un C(omment)V(endanger) pour l'associatif, ainsi une coopérative éditrice ?
Entendu pour la vendange tardive, je sais faire ! Encore faudrait-il que notre possible auteur potentiel se laisse cueillir.
ArD
Heureusement que JEA a tenu une permanence, je n'étais guère disponible (amis et enfants attablés).
Bonne année à tous. Je suis très heureuse de franchir la ligne vers 2010 hébergée par JEA dont j'aime les mots, les images, l'humour et la gravité.
Et merci à vous tous qui avez posé ici vos mots comme autant d'hirondelles pour un prochain printemps
@ Anonyme
comme vous y allez...
tout de suite des vendanges tardives, des mots qui traversent même les premières gelées après longues maturations et ne sont im-primés sur des pages (de chêne)qu'avec des signatures d'auteurs qui ont l'heur de nous plaire intensément
"Elle a écrit, sur le plâtre frais que son père appliquait sur les murs," J'aime cet extrait.
@ zoé lucider
franchir le nouvel an un peu comme un cap
grâce à votre initiative, sur le même bateau
et déjà les premiers oiseaux des commentaires qui annoncent la terre...
Je ne commente jamais après Anna de Sandre...
Question de principe, sinon où va t on ?
(C'est dommage parce que le texte de zoë me plaisait bien,
du coup elle ne le saura pas, c'est bête!)
@ Anna de Sandre
tandis que d'autres gosses se font battre comme plâtre...
@ L.................uC
Si Zoé décide de ne jamais commenter après moi, ce sera dommage car vous ne connaîtriez pas sa réaction, c'est bête car elle était particulièrement chal-heureuse...
@Anna et Luc, les enfants terrible...ment rigolos. Spéciale tournée de gi...boulées, il a beaucoup neigé cette nuit.
Autobio ? Non ? En tout cas, je crois aussi que l'identité est une notion. C'est pour cette raison que je ne sais pas toujours qui je suis.
Mmmmmmmmmmmmmh, écrire sur du plâtre frais, ça me donne faim soudain, je ne sais pas pourquoi...
Bel échange, et je vous souhaite à nouveau une belle et bonne année à l'ombre douce des mots.
Zoë, continuez de faire mousser vos improbables utopies.
L'an nouveau balaye la morosité des mois écoulés avec ses peines et ses douleurs, mais JEA saura nous transmettre le soleil qu'il a dans son cœur, avec ses merveilleuses pages qu'il a gardées dans sa "hotte".
Bonne année à toutes et tous. Un vœu parmi tant d'autres quoiqu'il arrive, "restez-lui fidèles"
Où l'identité se démontre comme voyage sans frontières, sans papiers et sans restrictions ("fraternité" disait l'autre soir le chef), belle parabole, hyperbole et carambole par-dessus ce que "la France moisie" (Sollers) voudrait imposer aux esprits libres.
Zoë, bonne années d'enfer (pavé de belles intentions) !
De grandes notions, de belles identités, merci et encore une toute 'bonne' année à tous !
@Dominique Boudou,il faut jouer cartes sur table, qui êtes-vous Polly Magoo ?
@Sophie K, quelle gourmande, t'apporterai une plâtrée de chocolats, tiens, biz ma belle K.
@la bacchante, vous devez avoir un bon tour de poignée, vous.
@Tolérance soyons fidèles à nos subtilités
@DH, pour les pavés, je compte sur vos livraisons régulières
@Claire, restez aussi limpide que votre joli nom
quelle belle photo une !
personne ne m'aime , personne ne veut s'emmêler le pinsot avec moi juste une fois , le temps d'une cerise sur moi gâteux !
joyeuse année !
@ Cactus
sans faire de l'ombre à la réponse de Zoé
je vous répète gentiment ce que je vous ai déjà proposé en privé : sur ce blog, une page nomade serait vôtre quand vous le souhaiteriez...
Beau texte, merci Zoë & JEA.
Comme j'ai aimé dans "Les identités meurtrières" d'Amin Maalouf qu'il y mêle son propre parcours, j'aime la manière dont Zoë fait ici, au passé composé, le récit de ses jeux, de ses lieux et de ses enjeux.
Bonne année sur la colline.
@Cactus, mais si on t'aime. Tiens veux-tu être mon prochain partenaire de vase communication. Mais il faut que tu prévoies quelque chose que je sache manipuler, pas de trop lourdes constructions. Enfin voilà avec JEA pour témoin
@Tania,merci, la colline s'est couverte de neige en une nuit, puis est redevenue verte en quelques heures. A bientôt chez vous et bonne année.
@JEA, cet échange a été très aimable et joyeux. Que l'année entamée sous ces auspices se déroule dans une tonalité aussi positive. Bien à vous
@ Cactus
là vous avez le dos au tronc de l'arbre à palabres pour le premier vendredi de février
et une page certes nomade mais néanmoins réservée ici
"geindre n'est pas de mise", mais ouvrez vos encriers...
@ Zoé
- "Les souvenirs grimpent et grimpent sur moi comme des fourmis sur un arbre."
Alona Kimhi
de ce premier (et dernier ?) "vase communicant", je garderai des souvenirs ouverts comme des fenêtres sur des airs baroques
j'arrive juste !
enfin !
je trompe ma plume , je trempe ma plume :
le vert du Rein , ça te va Zoë !?
un vert de terre uniquement pas un vert mi long !
en vers et contre tous en plus puisque un an de plus !
j'essaye de cerner ton sujet et ses objets : un complément s'impose !
de bons bonbons de Cambrai , une chère menteuse , 300 pages , un raton délavé , un laveur qui se tiendrait à carreaux verts sans jamais jouer aux boules avec les miennes !
je vais essayer d'être plus Claire et on s'élance !
j'ai juste poser les bases , marqué ton territoire : belle et forte tu devrais me cerner sans Max peine !!
j'y reviens !
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