DANS LA MARGE

et pas seulement par les (dis) grâces de la géographie et de l'histoire...

samedi 3 avril 2010

P. 262. En tête à tête avec un soleil volatil

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(Ph. JEA / DR).

Soleil

pyromane allumeur de bûchers
hérisson guetteur de nomades
fondeur de langueurs
saltimbanque pour châteaux de cartes
traîneur de sabre parcheminé de rouille
taxidermiste jamais libre
semeur de rumeurs comme des tumeurs
tribun au chiffon rouge
rouleau compresseur des désorientés
facteur d'orgues insensées
metteur en scène tectonique
potache coloriste aux doigts indélébiles

Tête de chenet ardennais (Ph. JEA / DR).

Tête à tête

haute-contre parti pour une fausse adresse
caboche comme sortie des tranchées
carafe délaissée sur une tombe
gueule aux silences vertigineux
poire pour toutes les traversées de déserts
mémoire aux reflets dérangeants
mine de poète crayon
chapeau enfoncé jusqu'aux yeux des tatouages
moineau aux ailes de charbon
corne de gibier déchiquetant les brumes
mort piratant un casse-pipes
chauve devin

Tourterelle d'avril (Ph. JEA / DR).

Proverbeux

les tourterelles montent au ciel mais y laissent des plumes
après le chagrin du crachin, la pitié des brouillards
c'est au pied du mur que l'on voit le crapaud pataud
quand la rivière est lasse de faire son lit elle découche
l'habit ne fait pas le corbeau
la nuit toutes les étoiles sont éprises
tant va l'élève cruche au tableau qu'à la fin il le casse
on ne tond pas les nuages même en troupeaux
chacun(e) voit midi à sa beuquette
avec des si on mettrait en bouteilles les silhouettes des oublis
en avril la propriété privée ne se découvre pas d'un fil de fer barbelé
à défaut de grives les merles se dévouent pour voler éperdument les aiguilles des horloges

18 commentaires:

Brigetoun a dit…

superbes photos - et j'aime bien le crapaud pataud

MH a dit…

Ah ! Ce soleil ! Ces mots que vous mettez ensemble donnent des images incroyables... et cette petite tourterelle blanche prise dans les branchages tordus... avec le son de la rêveuse, quel assemblage !! Vous êtes vraiment doué JEA.

JEA a dit…

@ brigetoun

Savez-vous que je ne suis pas encore remis du mot "fin" au bas de votre billet du 1er avril ?

JEA a dit…

@ MH

De Sederon, je ramenai comme cadeau un appeau pour tourterelles (vendu à condition qu'il ne soit pas utilisé pour la chasse). Eh bien, c'est magique. De longs dialogues s'engagent...

D. Hasselmann a dit…

Festival matinal, soleil irradiant pour la journée (et même au-delà).

JEA, vous prenez quoi, comme drogue ?

JEA a dit…

@ D. Hasselmann

Le matin ? Pas de secret.
Un arabica d'Ethiopie (enfin, "un", c'est façon d'écrire)...

noel a dit…

Ah, Sophie Watillon... Je conserve dans le coin le plus précieux de mon jardin des souvenirs, la rencontre que j'ai faite avec elle lors d'un concert de Wieland Kuijken que j'avais organisé à Namur.
Et puis la nouvelle de son décès à l'âge de 40 ans...
Les tourterelles montent au ciel mais y laissent des plumes.
Merci de nous rappeler sa présence.

JEA a dit…

@ noel

Merci vraiment à toi pour ces concerts que tu fis sortir des torpeurs namuroises : comme des parenthèses d'harmonies dans un monde quelque peu cacophonique...
J'imaginais Sophie Watillon sans âge quand la maladie a brisé son archet.

Zoë Lucider a dit…

On hésite à choisir entre tous vos proverbeux. (j'aime le mot valise)
Celui-ci me plait beaucoup
"après le chagrin du crachin, la pitié des brouillards".

"sisesses", le mot de passe du jour, qui siffle sur nos têtes

JEA a dit…

@ zoé lucider :

pour le mot de passe, il y a du Cactus dans l'air...

Marie a dit…

Un florilège de mots que l'on happe ... haut , et ce n'est pas un rap.. sot dit !! ^^;o)
J'aime cette tourterelle comme une demoiselle dans sa tourelle se laissant photographier pour des anges endimanchés ...
Bravo pour ces phrases qui embrasent le ciel ...

Que du bonheur de vous lire ;o)

Douce soirée ...

JEA a dit…

@ Marie

Je ne vous raconte pas : un instané pris après avoir à peine entrouvert le petite fenêtre de la salle de bain...
Vers 11h à la "nouvelle" heure.

Amitiés a dit…

Quelle finesse de langage, vous êtes un Poète. Vous maniez si bien la langue française. J'espère que l'on vous apprécie à votre juste valeur.
De très belles images également.

Chr. Borhen a dit…

" à défaut de grives les merles se dévouent pour voler éperdument les aiguilles des horloges "

Prions - ou formons des voeux - pour que ce soit vrai, très cher JEA.

JEA a dit…

@ Amitiés

René Char :
- "Notre amitié est le nuage blanc préféré du soleil".

JEA a dit…

@ Chr. Borhen

Le temps des cerises nous survivra... heureusement !
Mais au moins au présent, les merles moqueurs nous le sifflent avec tant de talent, tant de tendresse.
Toutes les blogueuses et tous les blogueurs - à l'exception d'une fosse à purin - sont si heureux que vous retrouviez votre place unique et laissée "libre" parmi nous en attendant que vous nous soyez rendu...

La Feuille a dit…

Commentaire d'une platitude regrettable mais qui me vient spontanément : c'est beau, tant les mots que les images. Ce bel assemblage mérite mieux que quelques paroles un peu "benoites".
En cette fin d'hiver qui peine à abandonner le terrain, quelle belle idée que cet ode au soleil. Plus qu'à tout autre moment de l'année, le matin, c'est la première information que je consulte : maître soleil est-il chagrin ou participera-t-il aux jeux d'aujourd'hui ? Quand je pense que dans quelques mois, le jardinier que je suis, regardera le ciel d'un air inquiet, cherchant le nuage tapi dans un coin permettant d'espérer quelques gouttes de pluie. Etrange attitude. La succession des saisons bouleverse nos humeurs et nos attentes ! Jardin mouillé attend le soleil ; jardin grillé attend les gouttelettes. A se demander si on n'attendrait pas tout le temps quelque chose ?

JEA a dit…

@ La Feuille

Quand vous venez planter vos jonquilles ici, croyez-bien que c'est jubilatoire...